Prolégomènes
A la faveur du séminaire que je dirige actuellement
au Collège (Théorie de l'heuristique littéraire),
je tente d'exhumer un des rameaux de la philosophie, perdu au
profit des sciences : l'heuristique, et d'en faire le pivot d'une
méthodologie de la critique littéraire dont l'interprétation
(ou plus largement l'herméneutique) ne serait plus la
fin mais le moyen. Au fil d'une étude de l'autonymie dans
la poésie française, je me suis attaché
à démontrer que l'heuristique pouvait constituer
l'horizon pragmatique de l'herméneutique - articulation
d'autant plus nécessaire que d'aucuns ont été
tentés ces derniers temps de rapprocher l'herméneutique
de la pragmatique par la seule vertu d'un syncrétisme
a priori.
L'heuristique qui jusqu'alors était instrumentalisée
par l'herméneutique en devient le principe et lui donne
un horizon téléologique, qui au-delà des
problèmes de genèse du texte et d'horizon d'attente
réorganise les méthodes de la critique littéraire
autour de l'inventio poétique et de la découverte
scientifique (non positiviste, cela va sans dire).
Après cette incursion dans le champ de la critique littéraire,
une autre intervention s'impose -peut-être plus urgente
encore - celle de la philosophie, de l'esthétique, dans
la critique d'art contemporaine. Si l'herméneutique est,
depuis Dilthey et a fortiori depuis Heidegger et Gadamer, la
discipline générale non plus seulement de l'interprétation
mais de la compréhension, force est de reconnaître
qu'en matière de philosophie de l'art les catégories
herméneutiques que sont la volonté de puissance,
la Weltanschauung, ou le couple tradition / modernité
(ou bien encore le "ménage à trois" tradition
/ modernité / post-modernité) nous sont d'un piètre
secours dans la compréhension des savoirs tacites et de
l'expérience des peintres contemporains - tant au sens
d'Erlebnis (expérience personnelle vécue) que d'Experiment
(expérience scientifique).
Il est donc nécessaire que nous réajustions les
concepts de l'esthétique philosophique pour que la raison
critique puisse enfin prendre comme objets les mondes du marché
de l'art, de la critique d'art et de l'institution culturelle.
A faire l'économie d'une pensée critique de l'esthétique
et de la nomologie en art, nous avons laissé s'installer
l'arbitraire de la valeur d'échange qui régit aujourd'hui
l'essentiel de la production artistique, situation sur laquelle
Walter Benjamin nous avait déjà alertés
à sa manière.
Cette démission met la philosophie sous la coupe réglée
du nihilisme événementiel (le journalisme) et de
ce platonisme par défaut qu'est le culturel (l'art officiel
où l'éphémère devient type). La vitesse
et la disparition sont les seules catégories qui gouvernent
tant la communication des images (cf. Paul Virilio) que les installations
plastiques.
Une fois brossé ce sombre tableau, soit nous donnons raison
à Hegel en nous résignant à la mort de l'art
- auquel cas la philosophie n'a pas lieu de se pencher sur l'art
contemporain - soit à l'autre extrême nous donnons
quitus à Nietzsche de la toute puissance de la volonté
créatrice de l'artiste comme seule valeur - auquel cas
il n'y a plus qu'à adhérer et à compiler
comme autant de vérités les déclinaisons
infinies de la Wille zur Macht als Kunst - soit enfin nous nous
livrons à une véritable pragmatique de la peinture
contemporaine en passant l'épreuve de vérité
de la visite d'atelier. L'esthétique philosophique ayant
trop souvent pris comme postulat ce qui n'était qu'opinion
de la critique d'art, la visite d'atelier est une condition de
l'esthétique aujourd'hui dans la mesure où elle
permet de démédiatiser le jugement.
Forts de ce rapport intersubjectif au sensible, nous ne positionnerons
pas la raison esthétique sans une relecture des corpus
philosophiques de l'esthétique tout d'abord, mais aussi
de la métaphysique et de l'éthique. Les arguments
sur foi desquels on a pu décréter l'obsolescence
des universaux que sont le beau, le vrai et le bien sous prétexte
qu'ils participeraient du seul idéalisme, ne tiennent
que par un schématisme tout idéaliste. Les conventions
philosophiques actuelles font que les jugements intersubjectifs
du beau, du vrai, du bien que nous formulons tous (honteusement)
ne constituent en l'état qu'un agrégat de savoirs
tacites qui ne font pas l'objet d'une pragmatique communicationnelle.
Un des objectifs du séminaire proposé sera d'approcher
ces savoirs tacites et d'évaluer les possibilités
de les mettre en perspective heuristique.
Si l'accolement à la notion d'art contemporain des universaux
de la métaphysique, de l'esthétique et de l'éthique
nous surprend, c'est sans doute que ni les revues marchandes,
ni l'art officiel des musées ne nous donnent à
voir - et partant à penser - l'art d'aujourd'hui. Pour
peu que le philosophe retourne à l'atelier, il découvrira
que l'art contemporain réel aura tenté ces dernières
années de répondre singulièrement aux trois
questions soulevées par Kant : « Que puis-je savoir
? », « Que dois-je faire ? », « Que m'est-il
permis d'espérer ? ». Et quant bien même les
réponses à ces trois questions sont loin d'être
unanimement kantiennes, on peut voir que la peinture des années
60 - 90 a mieux résisté aux modes esthétiques
que la philosophie elle-même. Nombre de peintres en effet
ont conduit un travail heuristique de réintégration
tant du sublime que de la raison pratique. Mais faute d'un climat
intellectuel favorable à la communication de ces vérités,
le discours qui recouvre leurs pratiques, (recouvrement qu'ils
encouragent souvent eux-mêmes) ne rend plus compte de la
relation de l'il au sensible, dans sa forme unique qu'est le
tableau où ce qui en tient lieu.
L'établissement des cotes par le marché de l'art
et la fabrication des postérités repose sur la
manipulation anéthique amétaphysique et anesthétique
des uvres. Dans un tel contexte, il apparaît que les savoirs
tacites (dont celui du peintre) et plus généralement
la connaissance ne sont pas des instruments de pouvoir, comme
on l'a trop hâtivement pensé naguère, mais
des outils de résistance au pouvoir du culturel.
L'art officiel français, art du constat de la fuite et
de la dissuasion, repose sur trois occultations néo-dogmatiques
: l'occultation métaphysique de la métaphysique
(par la canonisation du faux, du masque et du simulacre) - qui
s'accompagne d'un rejet des savoirs au profit des pouvoirs (art
magique de la fascination) - l'occultation esthétisante
de l'esthétique (bad painting, peinture de la disparition,...)
et l'occultation de l'éthique (refus de la nomologie,
confusion entre l'innovation et l'émancipation, valeur
picturale réduite à la valeur d'échange).
En évacuant la pensée critique du beau, la philosophie
de l'avant-garde (et non l'avant-garde elle-même) a créé
les conditions de la normalisation des avant-gardes. Ainsi le
néo-académisme de la modernité et de la
post-modernité ne tient que dans la mesure où la
disparition des catégories de beau, de vrai, de bien,
laisse à l'institution culturelle et au marché
les coudées franches pour faire l'économie de l'esthétique
et faire passer l'anomie pour la liberté.
Aussi au cours du séminaire, nous nous attacherons à
répérer les articulations gnoséologique,
métaphysique et éthique de l'esthétique
dans l'art contemporain. Kant avait déjà conçu
cette polysémie en pensant dans un premier temps l'esthétique
comme la théorie des conditions de possibilité
spatio-temporelle de toute expérience pour le sujet (cf.
Esthétique transcendantale in Critique de la raison pure)
avant de se consacrer à l'analytique du goût et
du sublime dans la Critique de la faculté de juger. A
noter que Kant baptise "exposition métaphysique"
l'examen des caractères de l'espace et du temps dans l'esthétique
transcendantale, et que le volet esthétique de sa critique
du jugement est articulée au volet éthique d'une
téléologie de la liberté de façon
moins hétéroclite qu'on veut parfois le laisser
entendre. La triade du beau, du vrai et du bien a marqué
l'uvre de Schelling et occupe une place centrale dans l'éclectisme
du malheureux Victor Cousin dont il conviendrait de reformuler
les intuitions, puisque tout laisse à penser qu'elles
hantent également l'art contemporain.
Relecture critique des corpus de l'esthétique,de
l'éthique et de la métaphysique à la lumière
des problèmes de la peinture contemporaine
Les propositions de ce séminaire seront effectuées
sur pièces, c'est-à-dire à partir d'un ensemble
d'analyses d'uvres contemporaines. Cela suppose en contrepoint
une relecture du corpus de l'esthétique ou des corpus
qui le recoupent (éthique, métaphysique,...). Nous
nous inspirons en cela d'Adorno qui engageait à "élaborer
une seconde réflexion pour sauver quelque chose des théories
de Kant et de Hegel" (Autour de la théorie esthétique,
Paralipomena) et Adorno d'ajouter : "la dénonciation
de la tradition de l'esthétique philosophique devrait
redonner un sens à celle-ci".
Relecture critique du corpus de l'esthétique
Il est d'usage de commencer par l'esthétique philosophique
conçue comme telle au XVIIIe ou au mieux de remonter à
la Renaissance (Alberti, Ficin, Pacioli, Dürer,...). Nous
choisirons d'accorder une attention particulière aux propositions
esthétiques du Moyen Age dans la mesure où ce fut
peut-être la seule période "absolument moderne".
A moins de juger comme Gadamer que la distance historique est
infranchissable dans la compréhension herméneutique,
de multiples dialogues sont possibles tels qu'entre l'esthétique
physiologique de la lumière chez Robert Grosseteste (XIIIe
siècle) qui professait que tous les corps obscurs sont
lumières et la mise en lumière des corps picturaux
noirs dans les dernières pièces de Pierre Soulages.
Liste, non exhaustive, de questions à intégrer
:
- La relation dans l'uvre d'Euclide entre les Eléments
et l'Optique et la catoptique.
- L'académisme décrit par Platon (par exemple celui
de l'art égyptien dans Des Lois) correspond-il à
l'académisme contemporain ?
- Le rapport entre esthétique et connaissance chez Crouzas,
qui dans son Traité du beau (1714-24) étudie globalement
les manifestations du beau dans les arts comme dans les sciences.
- Que reste-il dans la peinture contemporaine du rêve de
Baumgarten de fonder l'objectivité du beau et du vrai.
Ne faut-il pas s'arrêter à l'autre néologisme
qui marque l'Aesthetica de Baumgarten, "heuristica",
l'heuristique ?
- L'esthétique de Kant et l'art abstrait, à partir
des Observations sur le sentiment du beau et du sublime (1764),
de la Critique de la raison pure, et de la Critique de la faculté
de juger.
- Roger de Piles et le rapport entre le visible et la couleur
que reprendra Diderot dans son Essai sur la peinture.
- La communication des savoir chez Goethe dans Zur Farbenlehre.
- L'esthétique de Schiller dans son rapport avec celle
de Kant, pour qui il n'existe pas de liberté réelle
dans les phénomènes. Nous étudierons la
tentative de Schiller de concilier la liberté de la raison
avec la liberté de la nature en regard des problèmes
de l'art contemporain.
- L'esthétique de Hegel envisagée dans le rapport
conflictuel d'une philosophie avec l'art de son temps.
- A l'inverse, l'esthétique de Solger dans son rapport
d'adhésion à l'art de son temps (esthétique
romantique de la transfiguration, utilisation de l'ironie comme
déréalisation).
- A propos du système des beaux-arts de Schopenhauer qui
place la peinture et l'architecture en bas de l'échelle,
les tentatives de l'art conceptuel d'aujourd'hui ne visent-elle
pas à élever la peinture à un plus haut
rang dans cette hiérarchie encore sous-jacente au goût
contemporain ?
- Négation de l'esthétique et propagande politique
sous l'éclairage de Destruction de l'esthétique
(1870) de Pissarev.
- A propos de Nietzsche : les limites du néo-nietzschéisme
dans l'art contemporain.
- A propos de la valeur heuristique du jugement esthétique
chez Croce qui considère que l'activité de celui
qui juge s'identifie avec celle de l'artiste qui produit.
- Recherche sur l'esthétique de Husserl à partir
des Husserliana.
- Hermann Cohen et le concept comme objet esthétique dans
son Aesthetik des reinen Gefühls (1912).
- Problème d'archéologie du signe dans la Philosophie
des formes symboliques d'Ernst Cassirer.
- Analyser les prémices de l'art sociologique et de la
pragmatique de l'intersubjectivité dans Art as experience
(1934) de John Dewey. Dépassement des problématiques
de l'esthétique philosophique allemande : Le beau chez
Dewey comme synthèse entre le particulier et le général,
l'ancien et le nouveau, le réel et l'idéal.
- Savoirs tacites et perception du langage dans le Visible et
l'invisible de Merleau - Ponty.
- Etienne Souriau et le statut de l'esthétique (cf. Avenir
de l'esthétique). Sa définition de l'esthétique
comme philosophie des informulables vaudrait un commentaire kantien.
- A propos de la Théorie esthétique d'Adorno, nous
nous demanderons si la modernité (en peinture, chez Adorno,
celle de Klee et de Kandinsky) restera comme un mouvement de
"contestation radicale".
- Sur l'esthétique de Raymond Abellio et sur la pertinence
de la polarité art de la fascination / art de la transfiguration.
- Nous rapprocherons les analyses du cadre de l'uvre (parergon),
dans La Vérité en peinture de Jacques Derrida,
des problématiques du hard-edge, du shaped-canvas et de
la toile libre dans l'art moderne et contemporain.
- Ce que nous apprend le parcours de Jean-François Lyotard
de Discours, Figure (1971) (attaque en règle par l'espace
figural de la peinture du sujet, du beau et du goût) à
la Condition postmoderne (1979) et à l'Analytique du sublime
de Kant (1991) où Lyotard opère une certaine reconstruction
des idées de jugement, de juste et de vrai.
Relecture critique du corpus métaphysique
- A propos du livre VI de la Métaphysique d'Aristote
et de la valeur du poien comme repositivation d'une tekhne non
technologique et non technocratique et comme critère esthétique
(en écho au texte de Malevitch Dieu n'est pas déchu).
Puissance et acte, matière et forme : de l'entéléchie
dans l'art contemporain.
- Le traitement de l'objet dans l'art contemporain et les objets
"transphysiques" de Saint Thomas d'Aquin (De Metaphysica
prologus)
- Entre physique et géométrie :les équivalents
néo-plastiques des "immatériaux" métaphysiques
de Descartes (Méditations métaphysiques).
- Points, lignes et plans métaphysiques chez Leibniz.
- L'art construit de la raison pure chez Kant dans sa relation
aux déconstructions de la raison critique.
- En quoi l'esthétique expérimentale s'oppose à
l'esthétique métaphysique ? A propos de Chevreul
(qui a mis en évidence le contraste simultané des
couleurs) et de Fechner qui dans son Introduction à l'esthétique
(1876) oppose l'esthétique inductive de laboratoire (l'esthétique
von unten "d'en bas" ) à l'esthétique
métaphysique déductive (von oben, "d'en haut").
- Lire de Fouillée l'Avenir de la métaphysique
fondée sur l'expérience (1889) et de
Nicolaï Hartmann, Grundzüge einer Metaphysik der Erkenntis
(1921).
Relecture critique du corpus de l'éthique
- l'éthique à Nicomaque d'Aristote sous l'angle
de la relation éthique-politique (définie comme
l'éthique collective) l'art y est désigné
comme "une vertu dianoéthique", c'est-à-dire
par laquelle l'intellect fournit au désir à la
fois la fin et l'image du bien. L'art y est plus loin défini
comme l'habitude de créer avec la vraie raison et a pour
but de produire des choses qui peuvent exister ou ne pas exister.
Nous sommes bien loin de la conception prêtée à
Aristote d'une esthétique de l'imitation. L'art contemporain
peut donc entrer en dialogue avec la philosophie d'Aristote.
- S'interroger sur les incidences esthétiques, dans l'Ethica
seu liber dictus "Scito te ipsum" de Pierre Abélard,
de la naissance d'une conscience éthique subjective sans
rejet de la notion de péché.
- Arnold Geulincx dans son Ethica (1665) se prononce contre l'hétérogénéité
de l'âme et du corps. Les corps qui existent dans l'univers
ne sont que les modalités d'un corps universel. La liberté
pour Geulincx réside donc dans la contemplation. Nous
nous pencherons sur l'influence de l'anti-cartésianisme
sur une partie des artistes contemporains.
- Questions sur l'abstraction géométrique en uvre
dans l'Ethique de Spinoza. De l'autonomie des matières
par rapport au concept chez Spinoza et dans l'art contemporain.
- Shaftesbury et l'adéquation beauté-vérité-bien
qui permet à la raison de participer aux choix des moyens
par lesquels la volonté parviendra aux fins.
- L'itinéraire de Kant de la dissociation beau-bien (Fondements
de la métaphysique des murs, Critique de la raison pratique
) à la synthèse (Critique de la faculté
de juger).
- Schleiermacher dans ses Vorlesungen über Aesthetik subordonne
l'esthétique à l'éthique dans la mesure
où il définit cette dernière comme l'étude
de l'ensemble des libres activités humaines. Cette conception
gagnerait sans doute à être revivifiée à
l'heure où l'on se rend compte que la liberté en
art ne suffit pas à garantir l'exercice de la liberté
artistique.
- L'esthétique de Schelling et l'idéalisme trichotomique
du beau, du bien et du vrai.
- Considérations sur la relation humaniste que Bernard
Berenson établit entre éthique et esthétique
dans son Aesthetics and history (1948).
- l'Homo aestheticus de Luc Ferry et la relation esthétique
- éthique - politique.
COLLÈGE INTERNATIONAL
DE PHILOSOPHIE
Sciences, Intersciences, Arts
1, rue Descartes 75005 Paris
Michel LETER
LE BEAU, LE VRAI, LE BIEN
DANS L'ART CONTEMPORAIN
calendrier des séances
février à juin 1992
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En évacuant la pensée critique du beau, la philosophie
de l'avant-garde (et non l'avant-garde elle-même) a créé
les conditions de la normalisation des avant-gardes. Ainsi le
néo-académisme "moderne" et "post-moderne"
ne tient que dans la mesure où la disparition des universaux
que sont le beau, le vrai, et le bien, laisse à l'institution
culturelle et au marché les coudées franches pour
faire l'économie de l'esthétique et faire passer
l'anomie pour la liberté, l'innovation pour l'émancipation.
Cette démission met la philosophie sous la coupe réglée
du nihilisme événementiel (le journalisme) et de
ce platonisme par défaut qu'est le culturel (l'art officiel
où l'éphémère devient type). Le primat
de la force sur la forme gouverne tant la communication des images
que les installations plastiques. Les conventions philosophiques
actuelles font que les jugements intersubjectifs du beau, du
vrai, du bien que nous formulons tous (honteusement) ne constituent
en l'état qu'un agrégat de savoirs tacites qui
ne font pas l'objet d'une pragmatique communicationnelle. En
démédiatisant le jugement par une relation aussi
directe que possible aux uvres, l'objet du séminaire sera
d'approcher ces savoirs tacites et de voir comment nos positions
herméneutiques sont corrigées par les heuristiques
de la peinture.
I - le lundi 3 février à 20 heures salle des
débats A
Le point sur le beau : où Kant nous apprend que les théologies
pseudo-négatives de l'art contem contemporain sont hantées
par le beau ( bad paintings, arte povera,..) - l'art conceptuel
et Schopenhauer - le postmodernisme et John Dewey - les beaux
draps de Nietzsche - Adorno saisi par le beau - le voyage de
Monsieur Lyotard - la matrice exposée (René Bonargent,
Pascal Mahou,Gérard Duchêne) contre le support exposé
(B.M.P.T., Supports-Surfaces) - le dépassement des catégories
de l'abstraction et de la figuration dans les Egypte-Bleu d'Henri
Maccheroni.
II - le lundi 16 mars à 20 heures salle J 01
Qu'est-ce aujourd'hui que le beau ? : une nouvelle querelle des
universaux - Bernard Palissy, Jean-Pierre Crouzas, Kant, Schiller,
Goethe - l'entéléchie aristotélicienne dans
l'art contemporain - ce qu'il manque à Souriau et Merleau-Ponty
- l'uchronie de la morphogenèse contre l'anachronie de
la peinture de citation dans les oeuvres d'Henri Maccheroni.
III - le lundi 30 mars à 20 heures salle des débats
A
Heuristique du vrai : peut-on concevoir une philosophie de l'art
au-delà de l'herméneutique ? - valeur heuristique
du jugement esthétique chez Croce - que reste-t-il dans
la peinture contemporaine du rêve de Baumgarten de fonder
l'objectivité du beau et du vrai - Husserl par Abellio
- d'une polarité fabriquée par la critique : expressionisme
/ inexpressionisme (Germano Celant ) - les véritables
polarités de l'avant-garde : fascination / transfiguration
(ex.: cubisme / futurisme) - cette polarité aujourd'hui
: le pseudo-art conceptuel de Joseph Kosuth / le transformat
de Max Charvolen.
IV - le lundi 13 avril à 20 heures salle J 01
Vérité de la forme : Construction, déconstruction,
reconstruction chez Jean-François Dubreuil - Gérard
Duchêne, René Bonargent : un déplacement
de la question technique faux texte - vraie forme - le vrai sans
représentation - archéologie réelle / archéologie
virtuelle : les séries d'Henri Maccheroni - le carré
pictural, vrai ou faux ? - le carré minimal faussaire
du carré suprématiste - la vérité
mathématique déplacée par la peinture -
les faux constats de François Morellet et les fausses
morphogenèses du carré pictural - la conversion
matériologique du carré pictural chez Véronique
Roca - qu'est-ce donc aujourd'hui qu'une couleur vraie ?
V - le lundi 11 mai à 20 heures salle J 01
Le beau, le vrai, le bien : l'art dans l'éthique d'Aristote
- la divergence Solger-Hegel sur la relation de la philosophie
à l'art contemporain - l'itinéraire de Kant de
la dissociation beau-bien (Fondements de la métaphysique
des murs, Critique de la raison pratique) à la synthèse
beau-bien (Critique de la faculté de juger).- un aspect
méconnu de la pensée de Schleiermacher et comment
il entre en contradiction avec son herméneutique - le
beau, le vrai, le bien : Shaftesbury, Schelling, Cousin - la
conversion du sujet dans les toiles du Journal d'IL de Gérard
Duchêne - Qu'il n'y a pas de Nouvelle figuration ni de
Nouvelle subjectivité - la peinture, sujet non immanent
de la peinture : qu'est-ce que l'homme ? - les anomies du Land
art - l'art comme écologie ?
VI - le lundi 1er juin à 20 heures salle des débats
A
Prolégomènes à toute esthétique future
Le séminaire sera illustré par un accrochage
à la galerie Alessandro Vivas
du 3 au 28 mars 1992
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